Canalblog
Editer l'article Suivre ce blog Administration + Créer mon blog
Publicité
De brique et de broque
26 mai 2015

C'était il y a 100 ans, ... le mercredi 26 mai 1915, en direction de l'arrière

26 mai 1915 – mercredi

 

Les bombardements de 1916 donnent une idée de ce qu'étaient ceux de 1915, sans le casque Adrian (youtube.com/watch?v=vvWQwb43sXg)


 

Pour notre dernière matinée, nous sommes vivement bombardés par des obus de gros calibres qui cherchent nos batteries installées à quelque cent mètres de notre tranchée. Les gros éclats volent autour, et le bruit de chemin de fer grince sur notre tête. Tout cela est terrifiant, mais fait heureusement fort peu de mal. Nous n’avons pas un blessé dans les six compagnies ; quelques enterrés par un éboulement sont vite dégagés. À 12 h, nous recevons l’ordre de départ. Pour se donner de la force et pouvoir supporter l’étape, le commandant a fait porter de Marœuil du champagne qui, bu avant le départ, nous donne des forces factices. Mais la chaleur est accablante, et la transpiration active le courage de la vermine qui nous dévore. C’est insupportable. Le commandant a laissé chaque compagnie aller dans ses cantonnements, comme elle voudra et en prenant tout le temps qu’il lui faudra. Le rendez-vous est à Capelle-Fermont[1], village situé à cinq kilomètres environ de Marœuil, dans la gracieuse vallée de la Scarpe. Pour nous, nous partons, tirant la langue et traînant la patte. À Marœuil, le commandant et moi faisons une longue halte le long d’un mur où il y a un peu d’ombre et où des cuisiniers obligeants nous portent un seau d’eau. Nous ne finirions pas de boire. Au bas du village, à la gare, les chevaux attendent le commandant. Il part aussitôt, me donnant ses cartes et me disant de venir par les traverses où et comme je voudrai. Nous partons à petit pas avec les cyclistes et en faisant de nombreuses haltes. J’utilise les chemins de terre jusqu’au moulin d’Écoivres où des campements d’artilleurs sont installés au bord de l’eau, sous les hautes frondaisons de Saint-Éloi que nous contournons et qui, vu d’ici, constituent un des plus beaux paysages du nord de la France. Sur la route d’Acq[2], nous croisons le 66ème (9ème corps), relevé comme nous et qui descend au repos. C’est un vieux camarade de Zonnebeke et de Lorraine.

ECOIVRES notre famille com

Ecoivres avec, au fond, les deux clochers de Saint-Eloi (notrefamille.com)

 

À Acq, pause bien méritée dans un débit où nous trouvons de la bière. Nous traversons Frévin-Capelle[3] où les 2ème et 3ème bataillons cantonnent avec le colonel et, par la route de bas fond, à travers une campagne verdoyante et boisée, nous gagnons Capelle-Fermont dont les maisons à flanc de coteau se cachent dans la verdure. Aussitôt arrivés, bien que la nuit tombe : nettoyage, puis dîner en plein air, enfin, repos dans la paille. Ce fut ce soir-là que se termina la première période de cette offensive de mai, dont le deuxième acte eut pout théâtre le Labyrinthe et pour lieux de repos Pénin et Manin.

capelle fermont photo de l'atrebate panoramio com

 Le château de Capelle Fermont, de nos jours (photo de l'Atrébate panoramio.com)

 

 

Extrait du livre « Les carnets du sergent fourrier » :

http://www.editions-harmattan.fr/index.asp?navig=catalogue&obj=livre&no=41720

 

 

 



[1] Capelle-Fermont est à six kilomètres à l’ouest de Mont-Saint-Eloi, soit onze kilomètres à l’ouest de Neuville-Saint-Vaast.

[2] Acq est à mi-chemin entre Mont-Saint-Eloi et Capelle-Fermont.

[3] Frévin-Capelle est à mi-chemin de Capelle-Fermont et d’Acq.

Publicité
Commentaires
De brique et de broque
  • Ce blog reprend, depuis la fin 2015, la publication d'extraits d'un livre que je souhaite rééditer, les "Ecrits d'exil" de Maurice Gabolde, mon GP. Auparavant ce furent les extraits des "Carnets du sergent fourrier". Voir aussi (http://gabolem.tumblr.com)
  • Accueil du blog
  • Créer un blog avec CanalBlog
Publicité
Archives
Publicité